Tu
me feras mentir, c'est le rôle de tout enfant. J'ai fait mentir mes parents,
Hélène a fait mentir les siens, tu nous feras mentir.
Ce
sera des mensonges blancs, mais non moins des mensonges. Nous t'aurons prévenu,
nous t'aurons dit que, nous t'avertirons et chaque fois tu nous feras mentir.
C'est ton droit, ton privilège, ton destin. J'y vais fort en utilisant destin,
parce que c'est ce à quoi s'accrochent les parents. Nous souhaitons qu'un
destin différent t'entraîne, te mène, te prenne par la main et te guide vers
des sommets que nous ne pouvons qu'imaginer.
Tu
nous parleras de tes aventures et là où tu verras des occasions nous ne verrons
que des dangers. Là où tu verras des passions, nous n'anticiperons que des déceptions.
Là où tu trouveras le bonheur, nous ne verrons que bombes à retardement.
Tu
souffriras, comme nous avons souffert avant toi. Sauf que pour toi, ça aura des
proportions bibliques. Pour toi, nous serons des vieux singes qui prêchent aux
rocs parsemant les chemins. Pour nous, tu seras l'hirondelle qui annonce le
printemps en vain. Dans un monde où tout
est à refaire, à rebâtir, tu seras l'espoir de demain.
Nous
ne serons que les géniteurs de l'espoir.
Cassandre,
si au moins c'était si simple.
Pour
l'instant, tu n'es qu'une question.
«
Quand est-ce qu'on fait un enfant? »