samedi 31 mars 2018

Montréal - Paris


Les mots me reviennent. J'ai envie d'écrire une histoire. Malheureusement, avec le temps l'habitude s'est transformée en souvenir. Écrire des histoires ne fait plus partie de mon quotidien. Je n'écris plus, je rédige.



Deux voix: une profession, un art

Il y a quelques semaines, je me suis mis à entendre des phrases. Je marchais sur la rue et une voix s'est mise à narrer ce qui se passait autour de moi. Oh, pas grand-chose, juste quelques jolies phrases. Cette petite voix, il y avait longtemps que je ne l'avais pas entendue, une voix féminine.

C'est arrivé ce jour-là et c'est arrivé de nouveau. Je me suis surpris à l'entendre de plus en plus souvent, à ne plus lire ou écouter de la musique seulement pour pouvoir l'entendre plus aisément.
Pourtant, je passe ma vie à rédiger : des mémos, des formations, des instructions, des requis... je rédige des choses qui ont un but, mais n'ont de l'écriture que le médium.

Le jour, je rédige, le soir et la fin de semaine j'imagine écrire. Deux voix, deux buts, une profession et un art. J'ai réalisé que j'ai deux voix intérieures : une voix féminine qui écrit, une voix masculine qui rédige.

Anatomie d'une histoire en construction

La voix féminine m'a soufflé à l'oreille il y a deux semaines qu'il serait amusant d'écrire un huis clos. L'inspiration venait de ce petit périple à Québec il y a trois semaines, plus particulièrement du transport en voiture, de ce voyagement où les silences sont peuplés de vibrations, de contemplations anodines.

Ma première idée a été d'écrire un voyage entre Montréal et Québec, puis je me suis souvenu qu'il y a déjà un film sur le sujet. Et puis, une voiture, ça s'arrête. Et le voyage est trop court. J'avais une idée de ces quatre adultes qui partent pour une raison X à quatre.

Alors l'idée m'est venue d'un aller simple vers Paris. Parce que Paris me manque. Parce que je déteste l'avion. Parce que c'est le huis clos par excellence. Il ne me manquait plus que des personnages.
Quatre adultes, c'est trop pair. Je voulais avoir un débalancement dans les conversations, un élément étranger, quelque chose pour introduire un malaise, une contrainte. J'ai ajouté un enfant.

Les personnages se sont imposés : le couple parent, l'ami un peu bohème, la gosse de riche et l'enfant.

Une narration vivante

 Je ne suis pas un bon narrateur omniscient, j'aime écrire à la première personne. Une fois ceci statué, il me restait à déterminer : qui pouvait narrer cette histoire? Je me suis tourné vers l'enfant. Durant les derniers jours, j'ai imaginé cet enfant qui voit le monde comme on le lui raconte, comme son expérience peut lui faire voir le monde. La naïveté de l'enfance me permet d'introduire une subtilité permettant au lecteur de se faire sa propre idée sur l'histoire.

Son nom : Ian.

Et à mesure que la voix d'Ian s'introduisait dans mon imaginaire, je constatais la limite de cette approche. Il est beaucoup trop facile de se perdre dans la limite de vocabulaire, dans la limite de perception et puis, un enfant ça dort. Du moins, Ian dort en avion.

Alors, j'ai réalisé que je me ferais beaucoup plus de plaisir à écrire non pas avec un narrateur, mais cinq. D'abord Ian, puis Antoine (le bohème), Brigitte (la mère), Claire (la gosse de riche), Patrick (le père) et de retour à Ian.

Un synopsis

Ian arrive à l'aéroport avec ses parents. Il n'a encore jamais voyagé. Claire est déjà arrivée. Antoine est en retard.

Ian raconte : son père qui a les yeux brillants quand il regarde Claire, sa mère qui se renfrogne quand elle croise ces regards, Antoine qui fait rire sa mère, Claire qui est une princesse comme dans les films.

Et les questions qui n'ont pas encore de réponse... mais qui guident l'histoire.

Est-ce que Patrick est amoureux de Claire ou est-ce seulement qu'il fantasme sur elle? Sont-ils amants? Brigitte le voit-elle ou voit-elle autre chose? Patrick et Brigitte sont-ils heureux? Qui est Antoine et pourquoi est-il si nerveux? Claire, seule en première classe, fait ce voyage avec ses amis, mais pour quelle raison, elle qui connait et n'aime pas Paris? Qu'elle est l'histoire entre Patrick et Antoine? Quelle est cette vieille histoire entre Antoine et Brigitte? Pourquoi Claire semble-t-elle parfois dédaigneuse en regardant Antoine et Patrick? Qu'est-ce qu'Antoine cache dans son veston? Pourquoi Patrick va-t-il voir Claire lorsque Brigitte s'assoupit? Et lorsqu'elle se réveille, que lui dit Antoine à l'oreille? Pourquoi Antoine était-il en retard? Qu'arrive-t-il rendu à Paris?

Et la suite...

Peut-être que cette histoire verra le jour, peut-être ira-t-elle rejoindre les centaines de ses semblables sur un disque dur se dégradant tranquillement dans un tiroir, attendant l'obsolescence technologique qui transformera mes écrits en souvenirs échus.

Ce qui est important, ce n'est pas le résultat, c'est le retour de cette petite voix qui me dit d'écrire.

J'écris, donc je suis.

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